mardi 4 août 2009

Réparation

Le 3 août
Naturellement, le massif a disparu ! Impitoyable, mon humaine y a sévi avec son sécateur, tout en lançant des imprécations contre une quelconque nuisance du voisinage. Et incontinent, elle a revêtu une tenue de ville (j’appréhende toujours ces déguisements, qui peuvent être pour moi annonciateurs de déménagement probable, générateur de mal des transports), s’est emparée de ma personne (avec les ménagements habituels, signaux certains de déménagement), a disposé sur mon panier un tablier occultant et a MIS LE CONTACT !
Naturellement, j’ai été prise de malaise, que je qualifierais de vagal si je ne craignais d’être accusée de plagiat ou copiage. Et le plus fort, c’est que je me suis retrouvée dans une clinique où rôdaillaient des relents de chien, de putois, et heureusement aussi, de médicament, ce qui m’a un peu redonné courage : peut-être s’agissait-il du Val-de-Grâce ?
Oui, je crois que nous y étions, car la jeune-fille-au-thermomètre, allégorie vivante de la Miséricorde, m’y appela aussitôt par mon nom et en m’appliquant sur le sein quelque chose de rond et froid décréta très admirative : « Quel bon petit cœur ! »
Ensuite, elle dit un peu sèchement à mon humaine : « Tenez-la ! » (J’étais bien contente de voir pour une fois quelqu’un qui la commandait, ce n’est pas si fréquent chez ces damnés enseignants-chercheurs…)
Mon humaine baissa la tête, bien obéissante, et me plaqua sur la verte vallée de grâce où mes pattes dérapaient un peu. Mais je fis bonne figure.
Ensuite, je ne me souviens plus de rien, sinon d’un léger mal de tête ; je pensais être dans une chapelle fermée d’une superbe grille en fer forgé, la lumière des vitraux de couleur dansait autour de moi, des gens ululaient des chants d’église, je foulais un superbe tapis blanc siglé d’une fameuse marque de produits vétérinaires et la gentille jeune fille me disait : « Regarde qui est là ! »
Et là, dans mon val gracieux, il y avait mon humaine encore une fois habillée pour aller en ville, et qui dégageait d’affreuses odeurs de peinture, décapant, vernis, anticeci et anticela, car il faut vous dire que non loin du val des grâces est établi un magasin « tout faire », autrement dit tout gâcher, généralement, et où elle va en excursion pendant ses vacances.
Je tournais un peu, j’avais un drôle de goût dans la bouche et je n’ai pas échappé, cette fois encore, au malaise v…l (si quelqu’un a un remède, qu’il nous le donne, par pitié) et j’ai maintenant au cou une médaille avec à l’intérieur un code-barre, comme si j’étais une marchandise et non pas un bon petit cœur. Misère !
Et si vous voulez d’autres nouvelles, je peux vous dire que le colza et le blé sont entièrement moissonnés et les champs si bien labourés qu’on se croirait dans une récitation sur le mois d’octobre, sauf que dans la poésie il n’y a d’éoliennes que les harpes. Et à présent, j’ai un bon plan pour le mois d’août : je ne bouge pas d’un tas de rideaux bleus dans une chambre à la simplicité monacale, avec vue sur les éternels bricoleurs.